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Plume et Kalam - Abdelkarim Belkassem
7 décembre 2023

IA , auteurs perdants ?

livre-diversité

L'édito de la SGDL. 

 

Depuis plusieurs mois se font entendre, du côté des pouvoirs publics français, des voix convergentes, celle du ministre de l’Économie Bruno Le Maire et celle du ministre chargé du numérique Jean-Noël Barrot (entre autres), qui nous mettent en garde contre les menaces que ferait peser sur l’innovation la fixation de règles, notamment dans le cadre européen de ce qu’on appelle l’IA Act. 

À ce son de cloche alarmiste, nous, auteurs, opposons nos propres alarmes. Nous savons qu’existent aujourd’hui – et qu’ils sont appelés à prendre dans la vie de chacun une place considérable – des outils d’intelligence artificielle générative (ChatGPT est sans doute le plus populaire) qui ont la capacité à produire ultra rapidement et en quantité infinie des textes plausibles et des images crédibles. Nous savons que, pour être mis en place par les grandes plateformes américaines, ces outils se sont nourris silencieusement pendant des années du pillage d’œuvres moissonnées sur internet, œuvres aspirées pour entraîner les machines sans que l’on puisse établir aujourd’hui combien d’œuvres protégées sont concernées, ni identifier lesquelles. Nous savons que le pillage a déjà eu lieu, dans des proportions gigantesques, et qu’il continue d’avoir lieu. 

Forts de ce savoir, notre demande est simple : obliger ceux qui développent l’IA à rendre publiques les données à partir desquelles leurs outils sont entraînés et produisent des contenus. C’est la manière la plus simple de garantir aux auteurs que leurs droits sont respectés et qu’à l’avenir ils pourront autoriser – ou non – l’exploitation de leurs œuvres dans le cadre du développement de l’IA. C’est aussi la manière la plus simple pour que les citoyens soient informés sur l’origine des textes et des images auxquels ils sont confrontés, et qu’ils puissent exercer leur capacité à différencier ce qui est œuvre de l’esprit et ce qui est produit par une machine. Cette exigence de transparence devrait être comprise et prise en compte. Pour l’instant elle ne l’est pas.

Qu’est-ce qui se joue vraiment dans cette affaire ? Est-ce l’affrontement entre d’une part la défense d’un intérêt général supérieur (les potentialités économiques liées à l’innovation technologique, l’indépendance française et européenne face à la puissance des plateformes américaines) et d’autre part la préservation d’intérêts catégoriels – forcément égoïstes ? Est-ce, pour résumer grossièrement le débat, l’affrontement entre une France innovante, boostée par le dynamisme de ses start-ups et de ses "premiers de cordée", et une France rétrograde de créateurs arc-boutés sur leurs droits et leur désir de survie ? Pas du tout. 

Il est surprenant, et plusieurs journaux spécialisés l’ont souligné récemment, qu’une personnalité clé de ce dossier soit à la fois en position de peser  sur les choix politiques d’intérêt général et de défendre ses intérêts particuliers. Ancien secrétaire d’État au numérique, membre du Comité de l’Intelligence Artificielle Générative depuis septembre dernier, Cédric O est aussi co-fondateur de la société Mistral AI depuis mai dernier. En sa qualité d’expert, il est donc là pour guider la prise de décision du gouvernement. Mais, en tant qu’acteur privé, il exerce, selon le quotidien La Lettre, une influence considérable à Paris comme à Bruxelles "pour tenter de maintenir l’absence de réglementation des modèles d’IA de grande taille" conçus précisément par Mistral AI. Il y a là un double jeu troublant, pour ne pas dire choquant.

Face à cette confusion des genres et des intérêts, nous ne pouvons que réaffirmer avec plus de force notre exigence de transparence. Il n’y a pas d’incompatibilité entre régulation et innovation. Nous le savons d’expérience, nous les créateurs : les règles ne brident pas la création mais au contraire la stimulent. Pourquoi n’en serait-il pas de même dans l’univers technologique ?

Christophe HARDY, Président de la SGDL

Bien dit ! 

 Pcc Abdelkarim Belkassem

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Commentaires
C
Reste à savoir combien de livres ils ont pillés ...<br /> <br /> Bises
Répondre
O
L'argent mène le monde, malheureusement.<br /> <br /> Mais il ne faut pas baisser les bras, faire de la résistance...
Répondre
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