Chère Madame, Cher Monsieur,
Le gouvernement a enfin annoncé que vous pourriez rouvrir votre librairie au public le 11 mai prochain, dans le respect des gestes barrières. J’espère de tout cœur que cette promesse sera confirmée le 7 mai, date à laquelle le Premier Ministre a fixé un dernier état des lieux avant le déconfinement.
Je me félicite de cette réouverture que je demande publiquement depuis le début le 23 mars mais aussi lors des réunions de travail du Premier Ministre avec les dirigeants de parti politique. En effet, j’estimais alors qu’après avoir observé un délai de quelques jours après le début du confinement, le gouvernement aurait dû autoriser les libraires, comme la plupart des commerces de proximité à rouvrir avec des instructions précises de « gestes-barrières » que vous étiez tout à fait capables de remplir.
Les libraires sont des établissements qui savent prendre en charge individuellement chaque client, sans cohue particulière. Des dizaines de témoignages m’ont très vite convaincu que vous auriez pu vous organiser sans aucun risque pour la santé publique. Le sort injuste réservé aux libraires est comparable, hélas, à celui d’autres commerces de proximité comme les fleuristes.
Certains d’entre vous ont pu s’organiser pour faire des commandes livrées à leurs clients par différents moyens, mais tous n’ont pas eu cette opportunité. En tout état de cause, votre activité a été durement pénalisée par cette fermeture sourde aux retours d’expérience des professionnels.
Il est incompréhensible que le gouvernement n’ait pas encouragé votre activité en période de confinement plutôt que de fermer vos rideaux. En ce temps de confinement, de travail et d’études au domicile, les conseils et les services des librairies auraient été plus que précieux pour défendre notre exception culturelle.
Ces injustices étaient d’autant plus incompréhensibles que la grande distribution et les géants numériques étaient autorisés à vendre des ouvrages, opérant des transferts de clientèles et de chiffres d’affaires.
Pourtant, il est au moins aussi facile de faire respecter les gestes barrières dans votre librairie que dans une grande surface. A ce titre, sachez que je continuerai à me mobiliser auprès du Premier Ministre pour que les librairies puissent être ouvertes quel que soit le plan de déconfinement finalement décidé le 7 mai puisque votre activité, correctement encadrée, ne fait peser aucun risque sur nos concitoyens.
La réouverture de votre commerce le 11 mai impose que l’Etat mette à disposition des Français un nombre suffisant de masques et soit capable de tester un maximum de nos concitoyens, y compris les asymptomatiques, pour isoler les malades. Rien ne serait plus terrible qu’une deuxième vague d’épidémie liée à un effet
« boomerang » d’un déconfinement mal préparé.
Hélas, je ne peux qu’exprimer mes inquiétudes sur les carences persistantes de l’Etat. Tant que la France dépendra majoritairement des importations étrangères pour les masques et les produits pharmaceutiques permettant les tests, le système de prévention restera fragile. En tant que commerce de proximité, je sais que vous connaissez la valeur incomparable de la production locale qui seule, assure la force d’un pays en temps de crise.
Sachez que j’ai proposé au Président de l’Assemblée Nationale que les parlementaires soient tous autoriser à consacrer l’intégralité de leurs frais de mandat à l’achat de matériel de protection pour les soignants et les commerces de leur circonscription. Malheureusement, cette mesure de solidarité de bon sens n’a pas été autorisée par les Questeurs LREM et LR de l’Assemblée Nationale.
Dans le monde d’après que les libraires contribueront à construire en diffusant les idées, les récits et les projets, les leçons de l’Histoire, les témoignages du présent et l’imagination d’autres futurs, il ne sera plus acceptable que la rentabilité financière détermine notre vie commune. Que serait notre civilisation si les lecteurs n’avaient plus que comme seul conseil les algorithmes des grandes plateformes numériques ou les plans marketing de certaines maisons d’éditions plus puissantes que d’autres ? L’accès à la culture et au savoir reste le meilleur garant d’une vraie démocratie et d’une société émancipatrice.
Aussi, il est vital que les libraires puissent reprendre leur activité avec le moins de risques possibles, d’autant plus que votre activité était déjà frappée par une concurrence rude.
La date du 11 mai signifie aussi que l’Etat devra accompagner les commerçants qui vont devoir faire un nouvel effort de trésorerie pour reprendre leurs activités alors qu’il est possible que les clients restent prudents dans un premier temps avant d’être suffisamment rassurés pour reprendre des achats normaux.
Tout d’abord, il faut s’assurer que tous les commerçants qui ont eu besoin d’aide depuis le début de l’épidémie ont bien reçu les 1500 euros promis par le gouvernement ainsi que les aides pour payer les charges fixes. Il serait inacceptable que des professionnels qui ont été privés d’aide à cause de la bureaucratie ou de changements de règles ne bénéficient pas de la solidarité nationale alors que vous avez toujours payé vos charges et cotisations.
Peu de librairies ont pu bénéficier d’un report ou d’une annulation de loyers. Il est important que l’aide de 5000 euros ouverte aux professionnels puissent couvrir aussi les charges de mars et d’avril pour ceux qui n’ont pas pu en bénéficier avant.
Il sera sans doute aussi nécessaire de prolonger les aides de quelques semaines après le 11 mai, le temps que la vie économique retrouve son rythme. Il serait absurde de lâcher les commerçants du jour au lendemain alors qu’ils ont subi les dégâts dus aux manifestations de certains Gilets Jaunes, des grèves et conflits sociaux puis du Covid. A ce titre, il me parait évident que les charges sociales et autres cotisations de ces deux derniers mois ne doivent pas seulement être annulées mais reportées.
Nous avons aussi demandé que le chômage partiel ou technique soit étendu aux commerçants. En effet, 1500 euros est une aide insuffisante pour la plupart des indépendants et il n’y a aucune raison que vous ne bénéficiez pas de la même garantie de salaire que les employés. J’ai également proposé que le chômage partiel soit directement payé par l’Etat aux salariés, sans que l’entreprise n’ait à avancer la trésorerie qu’elle n’a pas forcement à cause de la baisse du chiffre d’affaires.
Enfin, concernant les prêts bancaires garantis par l’État, je sais que beaucoup d’entre vous ne souhaitent pas s’endetter mais j’ai demandé au gouvernement de favoriser les dossiers en souffrance.
Néanmoins, je comprends parfaitement que les commerçants estiment que leurs pertes d’exploitation soient garanties par leurs contrats d’assurance multirisque professionnelle. Hélas, contrairement aux catastrophes naturelles, les compagnies d’assurent prétendent que les catastrophes sanitaires comme la pandémie Covid-19 n’entrent pas dans le champ assurantiel. C’est pourquoi j’ai déposé une proposition de loi pour contraindre les assurances à assumer leurs responsabilités ! Dès lors que serait publié le décret interministériel de reconnaissance de catastrophe sanitaire, l’entrepreneur assuré pourrait faire valoir son droit à indemnisation auprès de sa compagnie d’assurance.
Il est intolérable que l’Etat ne fassent pas payer aux compagnies d’assurance ce qu’elles vous doivent ! En tant qu’élu de terrain, je sais le coût des assurances prévoyance pour les commerçants de ma commune et je suis scandalisé qu’un fois encore, les compagnies d’assurance soient largement en dessous des attentes.
Comme vous le savez, l’argent ne pousse pas sur les arbres ! Afin de financer les mesures pour vous soutenir, j’estime que les Parlementaires devraient participer à l’effort national, à savoir baisser de 16% leurs indemnités pour être au niveau de tous les Français en chômage partiel. J’ai personnellement versé un chèque représentant ce montant à des associations locales qui se battent contre le Covid19 sur le terrain.
Il me semble naturel que l’Etat demande rapidement à la Grande Distribution et aux plateformes numériques de participer à l’effort national. Les supermarchés ont largement bénéficié d’un report de la consommation sur leur monopole de facto organisé par l’Etat ainsi que des hausses de prix révélées par UFC Que Choisir.
J’estime que les bénéfices supplémentaires encaissés par la Grande Distribution et les plateformes numériques devront revenir à la solidarité nationale, en particulier pour soutenir le commerce de proximité. Il serait intolérable qu’une minorité s’enrichisse, même involontairement, sur le dos du malheur des autres.
Enfin, nous devons revoir les règles absurdes de marché public qui empêchent l’Etat et les collectivités locales de favoriser librement les librairies de proximité pour honorer leurs commandes de livres et d’ouvrages. Il faut même inverser la logique imposée par les mauvaises règles de l’Union Européenne, de toujours valoriser la concurrence par le seul prix coutant, qui se fait au détriment des commerces de proximité. Laissons aux collectivités locales la liberté de valoriser la proximité et les services rendus par les librairies dans les appels d’offres afin de les mettre en valeur comme il se doit.
Alors que votre contribution à l’exception culturelle française, à la richesse nationale et à la vitalité de nos territoires est irremplaçable, vous êtes constamment assommés par les taxes et les réglementations en temps normal et, en temps de crise, vous êtes, pour beaucoup, écartés des mesures les plus importantes. Sachez que vous pourrez toujours compter sur moi.
Si vous souhaitez vérifier la constance de mes positions sur la crise actuelle, vous pouvez consulter la chronologie de mes interventions en cliquant ici. Je vous rappelle enfin que mon cabinet parlementaire se tient à votre disposition au 01.69.49.29.30 ou sur
nicolas.dupont-aignan@assemblee-nationale.fr.
Vous assurant de tout mon soutien, je vous prie de croire, Chère Madame, Cher Monsieur, à l’expression de mes cordiales salutations.