Les artistes et l'épidémie au Maroc

16 avril 2020

18 ème article de presse francophone

" Au Maroc, Les artistes, victimes de Coronavirus "

Avec cette crise du virus Covid-19 et la situation effrayante pour les concitoyens, les conflits explosent et des fausses victimes tombent sous les insultes et les paroles haineuses des langues perverses.

C'est triste et les artistes sont eux-mêmes atteints par le virus. Ils vivent la même problématique que celle de tout le pays. Ils sont confinés, comme tout le monde. Le coronavirus est démocratique et ne fait pas de différence entre l'enfant et l'adulte et le riche et le pauvre.
Les personnes aisées vivent un confinement de luxe. Pour les pauvres, le leur est une prison. Ils sont enfermés dans un terrier, mourant de faim s'ils n'ont pas quoi manger ou sans une main généreuse pour les aider. L'Etat marocain ne peut guère faire plus, malgré les moyens et tous les efforts. Les gens restent dans des situations précaires en souffrant de plus en plus.
Comme d'habitude dans les sociétés orientales, il faut un bouc émissaire. Un mouton de sacrifice dont les artistes sont, cette fois, les victimes.

La population et les intellectuels critiquent les chanteurs, les fêtes de musique, les festivals et autres.
Ils font en sorte de disqualifier le choix de la société et des dirigeants. La politique porte plus d'intérêt aux artistes et aux jeux de football, par exemple qu’aux scientifiques !

Mais ne nous trompons pas. Chacun a son rôle dans la société et on a besoin de tous. En période de paix, la joie et en période de guerre, la sérénité et des combattants défendant la nation. Chacun joue sa partition, même en se croyant passif.

Des artistes américains ont offert des fortunes pour aider les hôpitaux et les soignants dans cette crise. Proposant des moyens pour les protéger en étant à l'aise dans leur travail, tout en épargnant les soignés.
Des acteurs de cinéma et de grands sportifs ont aussi remis des dons pour participer à l'effort national et aider l'Etat qui ne peut pas tout faire dans une pandémie comme le coronavirus.
Ils ont aussi appelé à les imiter.
Les artistes sont à leur place dans la société en temps de paix comme en période de guerre. Ils souffrent, eux aussi, comme tous les citoyens et ressentent les deuils.

Certains chantent pour distraire, d'autres jouent des pièces théâtrales ... Chacun bénévolement dans le domaine qui lui est familier. Un rugbyman français s'est présenté comme volontaire dans un hôpital pour être disponible là où on aurait besoin de lui. Pourquoi pas les Marocains ?

Les artistes aident toujours, qu'on en soit informé ou non.
Pourquoi donc les insultes et la haine déversées sur les artistes marocains ?

Des noms ont été choisis par hasard, ceux de la chanson populaire, comme d’autres. Des messages sont devenus viraux sur la toile internet. Certains les envoient, en message privé sur les réseaux sociaux pour semer la haine et se moquer. Une haine gratuite particulièrement injuste.

Pourquoi fait-on ce choix ? Pourquoi propager la discorde ? Tout est bon pour trouver une occasion de démolir l’ami ou l’ennemi.

N’y-t-il pas autre chose à faire ? Du bien, par exemple ?

Aider, se porter volontaire, aimer les autres ! Nous avons vraiment besoin d'amour dans des moments difficiles, comme ceux du coronavirus.
On ne donne rien avec la haine et on fait beaucoup avec l'amour et le respect.
Si on a des choses à dire, il faut en choisir la façon. C'est ce qu'on appelle l'éducation et la discipline.

Nous sommes un peuple de morale. On est supposé être le peuple choisi par Dieu pour donner l'exemple au monde, nous les Marocains, comme tous les musulmans.
Notre comportement donne des idées sur ce que nous sommes. Ne soyons pas jaloux parce qu'un de nous a eu la chance de réussir, avec ses grands efforts. La réussite est aussi un don de Dieu pour les uns, et non pour les autres. Une distribution juste du Créateur et on y croit.

Voyons de plus près les artistes du Maroc !
Ils ne sont pas tous riches et ne possèdent pas de fortune. Ils donnent plus qu'ils ne gagnent. Des martyrs de la société. On reçoit de leurs nouvelles dans les quotidiens et sait qu'ils n'arrivent même pas à vivre, dignement, après avoir cessé leurs activités ou quand ils tombent malades.
Des dons du Roi du Maroc restent la seule ressource qui les sauve, après être tombés entre les griffes de la maladie ou de la vieillesse.
Il est rare que les artistes qui ont réussi ne soient pas dans le besoin.
On a détesté nos artistes, l'art est illicite dans la société musulmane. On les a humiliés, comme les musiciens du Moyen-Âge en Europe.
Ils n'ont aucun droit réel sauf sur les papiers et la plupart d'entre eux vivent toute leur vie misérablement jusqu'à la fin.

Pourtant, ils servent à quelque chose. On a besoin d'eux, dans les moments joyeux, comme dans les moments tristes. Chants d'amour et chants soufis.
L'art est l'humain. C'est le miracle de l'homme. Ce qu’il restera de lui. L'art est la création de l'homme et le souffle du Créateur en lui. L'art est le génie de l'humain et sa nature instinctive.

La haine des artistes et de l'art n'est qu'une idéologie idiote qui aveugle les hommes. Un chemin qui ne peut être ni moral, ni vérité.
Tout ce qui pousse à la haine n'est pas humain et l'ignorance est le chemin du diable.
Il est temps de changer notre choix et de suivre la voie salvatrice.

Arrêtons la haine et les jugements de valeur!

Abdelkarim BELKASSEM
16 avril 2020

Gifs: "Gnawa", photo d'Ahron de Leeuw 2009- CC "Femmes marocaines" toile de Rachid Sebti